il y a quelqu'un qui m'a dit...

Publié le par sol-eille

Il y a quelqu’un qui m’a dit qu’hier elle attendait sous la pluie, dégoulinante, tremblante sans parapluie. L’eau glissait sur son visage insensible se mêlant à ses larmes et aux embruns. Le vent d’ouest ne faisait pas s’envoler ses cheveux longs mais gonfler son imperméable bleu marine fermé et déjà trempé qui gouttait tout autour d’elle.

Il y a quelqu’un qui m’a dit qu’il la trouvait belle ainsi abandonnée, triste et sans vie, appuyée à la balustrade, regardant son parapluie s’envoler dans les airs, au rythme du duo fou du vent et du tonnerre qui s’en donnaient à cœur joie.

Il y a quelqu’un qui m’a dit qu’elle restait là immobile aux caprices des giboulées de mars, en avance cette année. Il l’observait intrigué et au chaud depuis son bureau de l’étage, tout en sirotant un café fumant, attiré par cette fée, exposée là impudique à tous les vents.

Il y a quelqu’un qui m’a dit que la pluie s’est arrêtée, que la tempête s’est posée dans une flaque à ses pieds, bien serrés côte à côte et que l’orage qui faisait rage a capitulé, mais pas elle, elle était toujours là, impassible aux gens derrière leur fenêtre qui jasaient et qui aimeraient savoir ce qu’elle attendait sous le gros grain.

Il y a quelqu’un qui m’a dit qu’il la regardait une dernière fois avant de quitter son bureau, et décidait de descendre lui offrir un café, au bar de la plage qui porte bien mal son nom un jour de grande marée comme aujourd’hui dans ce lieu désert, qu’il était sûr que de là elle pourrait continuer à surveiller ou à attendre. Si elle préférait il ne lui parlerait pas, il resterait là à la regarder, à boire ses larmes, à s’abreuver de chaque gouttelette d’eau et de sel, en pensée bien sûr, mais ça sècherait son corps et chaufferait son cœur il en était sûr.

Il y a quelqu’un qui m’a dit que le temps d’arriver en bas, elle avait disparu. Il est resté quelques instants à sa place, mais il faisait froid et la flaque brillante à ses pieds était boueuse et sale, il était glacé jusqu’aux os, il savait qu’il aurait dû quitter son bureau et la rejoindre plutôt. La magie avait disparue avec la fille de la balustrade.

Il y a quelqu’un qui m’a dit qu’il est allé au bar de la plage boire quelque chose de fort pour se remettre d’avoir vu son destin et son Amour s’envoler. Elle était là, à la petite table de droite près de la fenêtre, seule, les yeux perdus dans son verre de cognac.

Il y a quelqu’un qui m’a dit que leurs yeux se sont croisés. Il s’est assis en face et a salué son destin qui fait les choses bien. Elle n’a rien dit et lui non plus. Il n’a pas osé rompre son silence, et ils sont restés là à écouter le vent dehors et à regarder les parapluies s’envoler jusqu’à la fermeture du bar de la plage. Il l’a prise par la main, prêté son manteau chaud et sec et ils sont sortis.

Il y a quelqu’un qui m’a dit, qu’il était là ce grand échalas à l’attendre, maigre et pâle, la guerre sans doute, une valise et un sac à dos qui semblaient avoir beaucoup voyagé et une rose rouge séchée à la main, qu’il tenait comme son plus beau trésor. Leurs yeux se sont éclairés comme par magie et ils se sont reconnus. L’air s’est allégé, l’ambiance s’est modifiée, leurs visages se  sont détendus, alors il les a laissé à leur bonheur, leur merveilleux, indicible, indestructible bonheur qui permet d’y croire par tous les temps du ciel, de la terre et du cœur des hommes.

Il y a quelqu’un qui m’a dit qu’ils ne l’ont pas vu s’en aller. Il n’était pas à sa place dans ce tableau, alors il s’est évaporé du paysage éphémère, dernier coup de pinceau du peintre et de l’écrivain.

 

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B
<br /> <br /> Il est vrai que je préfère cette version là. Maudite contrainte qui prive Kaleïdoplume d'un très joli texte qui raconte si bien les moments loupés. <br /> <br /> <br /> En lisant ce texte, je sais c'est stupide, mais il me vient une chanson "a nos actes manqués". Pfff quel manque de culture musicale, j'en suis presque triste. <br /> <br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> je préfère très nettement cette version à celle de ton "plan B" <br /> <br /> <br /> même si je crois que tu pourrais condenser mieux tes strophes, pour n'en garder que le meilleur.<br /> <br /> <br /> du grand sol-eille (après toute cette eau, c'est normal, il parait  )<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Merci de ta visite ici !<br /> <br /> <br /> et merci pour le conseil aussi, je vais essayer de condenser tout cela.<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Merci neo pour tes rimes, posées doucement ici au pays de l'essayeuse d'écrits. Bienvenu à toi !<br /> <br /> <br />
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N
<br /> <br /> bONSOIR Soleil ,<br /> <br /> <br /> Merci à Toi de faire le Lien ,<br /> <br /> <br /> J'ai pris au Vent ce beau Chemin ,<br /> <br /> <br /> Entre Rayons d'un bel Eveil ,<br /> <br /> <br /> Je m'en viendrais en Blanc Matin ,<br /> <br /> <br /> Chercher de l'Hors qui sommeil ,<br /> <br /> <br /> Au creux des Vers de ton Ecrin.<br /> <br /> <br /> A bientôt , au Revoir.<br /> <br /> <br /> NéO~<br /> <br /> <br /> <br />
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T
<br /> <br /> j'aime beaucoup ce texte de destins croisés, l'expression de cette attente, tour à tour, des personnages<br /> <br /> <br /> on n'est pas toujours là au bon moment, au bon endroit, pour rencontrer l'autre, et partager un bout de chemin avec lui....combien de loupés, de "pas vus", de "trop tôt" ou de "trop tard"<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Merci Tisseuse d'être passée !<br /> Installe-toi, prends ton temps !<br /> <br /> <br /> Oui, bien d'accord avec toi et les si j'avais su... n'y changeront rien !<br /> <br /> <br /> @ bientôt j'espère !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />